État de conservation des « lagunes côtières » d’intérêt communautaire (UE 1150*)
Méthode d’évaluation à l’échelle du site Natura 2000 et classeur technique
L’UMS PatriNat et le Pôle-relais lagunes méditerranéennes (TDV, CEN Occitanie et OEC) ont travaillé de concert sur la mise à jour de la méthode d’évaluation de l’état de conservation de l’habitat lagune côtière dans le cadre du projet européen Life Marha.
La première version de cette méthode, datant de 2013, devait être mise à jour pour tenir compte des dernières données bibliographiques, expertises scientifiques et des retours d’expérience suite au test de la méthode. L’évaluation de l’état de conservation des lagunes côtières méditerranéennes est une obligation liée à la directive européenne « Habitats-Faune-Flore » (92/43/CEE) (DHFF), transposée dans le droit français dans l’article R.414-11 du Code de l’environnement. L’objectif sera donc à terme d’appliquer cette évaluation à l’ensemble des sites contenant cet habitat d’intérêt communautaire prioritaire (1150-2*).
Dans la continuité de la mise à jour de la méthode d’évaluation de l’état de conservation de l’habitat lagune côtière, le PRLM, dans le cadre du projet Européen Life Marha, a réalisé un classeur de fiches techniques qui en constitue une annexe pour l’appui à la mise en œuvre opérationnelle. Ce classeur est à destination de tout opérateur susceptible d’évaluer l’état de conservation de l’habitat lagune côtière, dont les techniciens de gestion des lagunes des sites Natura 2000. En 70 pages, cet outil technique s’efforce d’être opérationnel et pragmatique. Il présente ainsi trois parties aidant à l’organisation et la mise en œuvre de l’évaluation :
Elle présente la définition de l’habitat lagunaire et pose le cadre et les attentes de l’évaluation de l’état de conservation et de son rapportage à l’échelle nationale et européenne. Cette note de synthèse descriptive de l’habitat lagune méditerranéenne présente les types de lagunes auxquels s’applique l’évaluation.
La préparation de l’évaluation sur un site nécessite de prendre du temps pour la planification des tâches et prévoir en conséquence le temps de mise en œuvre et son financement. Pour ce préalable, un tableau rassemblant les indicateurs de la méthode est intégré au classeur, et précise le type de lagune concerné par indicateur et des fourchettes estimatives de temps et de coûts dédiés pour leur évaluation. Ce tableau est accompagné d’une frise chronologique pour repérer les périodes d’application des indicateurs et les indicateurs y sont illustrés sur une aquarelle signée Cyril Girard.
Les fiches descriptives des 12 indicateurs reprennent des informations clefs fournies dans la première version de la méthodologie. Ces informations ont été mises à jour grâce à la contribution d’experts scientifiques et à une recherche de la bibliographie scientifique associée à ces méthodes. Ces informations ont été enrichies d’exemples de valorisation des résultats.
Le projet Life Marha
Depuis l’adoption de la directive Habitats-Faune-Flore (DHFF) en 1992, l’Union européenne s’est engagée dans la préservation des Habitats d’Intérêt Communautaire (HIC), en mettant en place le réseau Natura 2000, d’abord à terre, puis étendu au milieu marin à partir de 2008. Le projet Life intégré Marha s’inscrit pleinement dans cette dynamique, avec pour ambition de rétablir et de maintenir le bon état de conservation des habitats naturels marins, en soutenant l’ensemble des acteurs impliqués dans la gestion des 162 sites Natura 2000 marins et lagunaires méditerranéens. Coordonné par l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et porté avec plusieurs partenaires, le projet s’étend sur huit ans (2018-2025). Il vise à améliorer l’état de conservation des habitats marins, tout en mobilisant les parties prenantes du réseau Natura 2000 en mer et en diversifiant les sources de financement.
Dans ce cadre, le Pôle-relais lagunes méditerranéennes fait partie des 14 bénéficiaires associés du projet. Il a contribué à l’amélioration de l’évaluation de l’état de conservation du HIC prioritaire « lagunes côtières », en jouant un rôle de trait d’union entre les acteurs et en co-pilotant, avec l’UAR PatriNat, l’élaboration d’un classeur technique (Barré et al., 2020). Issu d’une méthode d’évaluation développée par Lepareur et al. (2019), ce document propose un cadre d’analyse plus simple, pertinent et pragmatique, conçu dans une démarche à la fois collaborative et itérative.
Pour favoriser son appropriation, le Pôle lagunes a accompagné les animateurs N2000 et gestionnaires des sites concernés dans le déploiement des indicateurs. Parallèlement, une dynamique partenariale a été instaurée avec les acteurs exerçant des activités susceptibles d’impacter l’habitat, dans le but de faire évoluer les pratiques et d’améliorer durablement son état de conservation. L’approche à l’échelle de la façade méditerranéenne française (Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse) a constitué une réelle valeur ajoutée, en permettant un déploiement à large échelle de la méthode, enrichi par des outils innovants.
Bien que certaines évaluations demeurent incomplètes, elles offrent aux gestionnaires les éléments nécessaires pour prioriser leurs actions, en les adaptant aux enjeux spécifiques de chaque secteur. L’objectif final demeure une gestion plus durable et plus efficiente de cet habitat remarquable.
La stratégie déployée en région Corse
À la suite d’une enquête menée par le PRLM en 2019, il a été validé que les stratégies de déploiement des indicateurs de la méthode d’évaluation de l’état de conservation des lagunes seraient distinctes entre les trois régions de la façade méditerranéennes françaises : Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse.
En Corse, la stratégie adoptée par l’Office de l’Environnement de la Corse, en accord avec la DREAL Corse et l’OFB, a mis l’accent sur le suivi des lagunes de petite taille (<30 ha), plus nombreuses (Ligorini et al., 2023) et souvent moins étudiées et documentées que les lagunes suivies dans le cadre de la DCE (Mattei, 2021). Cette stratégie repose sur des prestations externes et expertises internes pour déployer et développer des indicateurs spécifiques adaptés aux gestionnaires.
L’objectif principal est double : (i) fournir aux acteurs locaux des outils simples d’évaluation et de gestion pour assurer un suivi durable des lagunes, tout en répondant aux exigences de la DHFF concernant l’évaluation de l’état de conservation des sites Natura 2000 et (ii) améliorer les connaissances scientifiques sur ces milieux, en développant notamment des indicateurs complémentaires à ceux de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE), dans les lagunes où ces derniers ne sont pas utilisés.
En Corse, 20 sites Natura 2000 accueillent l’habitat d’intérêt communautaire prioritaire 1150*, regroupant au total 44 lagunes. Dans le cadre du projet Life Marha, 8 d’entre elles ont été évaluées entre 2019 et 2023 :
- 3 lagunes pilotes : la lagune de Crovani, propriété du Conservatoire du littoral (CdL), animée par l’OEC dans le cadre du site Natura 2000, et gérée par la Collectivité de Corse (CdC). Il s’agit de la seule lagune temporaire évaluée en Corse. La lagune de Pisciu Cane, également propriété du CdL, est gérée par l’OEC. Elle est classée en Réserve Naturelle. La lagune de Balistra, en propriété privée, ne bénéficie actuellement d’aucune gestion, le document d’objectifs (DOCOB) étant encore en cours de rédaction ;
- 2 lagunes complémentaires : les lagunes d’Arasu et de Santa Ghjulia, qui ont fait l’objet de suivis approfondis dans le cadre de travaux doctoraux menés par l’Université de Corse (Ligorini, 2023 ; Crayol, 2023) et d’un diagnostic écologique (Malet et al., 2023)
- et 3 lagunes suivies dans le cadre de la DCE : la lagune de Biguglia (classée Réserve Naturelle), Urbinu (Zone Spéciale de Conservation - ZSC) et Palu (Zone de Protection Spéciale - ZPS), toutes gérées par la Collectivité de Corse et suivies par l’Ifremer dans le cadre de la Directive-Cadre sur l’Eau (DCE).
Ainsi, le projet Life Marha en Corse a permis de contribuer à la préservation des lagunes côtières en renforçant les connaissances, les outils d’évaluation et de gestion et la montée en compétences des acteurs locaux. Les résultats de l’évaluation de l’état de conservation des lagunes en Corse qui aura durée 4 ans sont désormais disponibles : Garrido et al., 2025
